Le Blog Ciné de Boustoune est désormais fermé…

… Mais retrouvez mes critiques sur le site Angle[s] de vue

Publié dans Non classé | Laisser un commentaire

La dernière séance…

Déjà, je vous souhaite à toutes et tous une excellente année 2010, emplie de joie, de bonne humeur, d’amitié et d’amour, autant d’atout pour faire face à la crise économique (Aaaahhh!) ou aux virus exterminateurs (re-Aaaaah!). Que bonne santé, réussite et prospérité règnent dans vos foyer tout au long de cette nouvelle décennie qui commence!

Une année, une décennie commencent, mais ce blog, lui, va s’arrêter… C’est ici mon dernier billet, car je suis venu vous dire que je m’en vais. Et que vos sanglots
longs n’y pourront rien changer, ô, fidèles lecteurs qui m’avez supporté, soutenu, encouragé au cours de ces années partagées. Trois années exactement.
Oui, voilà trois ans que j’ai ouvert ce blog pour voir, sans trop savoir où ça allait me mener. Au début, c’était surtout pour moi, pour avoir un espace où écrire mes impressions sur les films que je voyais. Et puis des lecteurs sont venus jeter un oeil curieux sur mes écrits, les ont appréciés, sont repartis vers d’autres horizons ou au contraire ont commencé à me suivre assidument. Cela m’a donné envie de continuer à écrire, et même à étoffer un peu l’ensemble.
Le problème, c’est que la plateforme Windows live s’est avérée particulièrement limitée quant à ses possibilité d’évolution, et tellement bardée de protections qu’elle empêchait la reconnaissance de ce blog sur les moteurs de recherche et les classements de blogs cinéma, lui limitant l’accès à tout un lectorat potentiel.
Pour couronner le tout, le réseau msn, qui permettait à quelques internautes de passage de trouver leur bonheur sur les différents blog windows a décliné au profit de Facebook et autres réseaux sociaux plus modernes… De quoi me donner envie d’aller voir ailleurs si la vie n’y est pas plus belle…
Et puis, faute de temps disponible, j’ai été amené à délaisser un peu le blog au cours des derniers mois, accumulant un retard que je ne cherche même plus à surmonter. Conséquence immédiate et logique, une bonne partie de mon lectorat a déserté et est parti trouver ailleurs sa dose de critiques hebdomadaires…
Alors, c’est décidé, j’arrête… Ce blog restera ouvert pour vous permettre d’accéder aux anciens billets, mais il ne sera plus mis à jour…

Mais ne soyez pas tristes. Ce n’est pas vraiment une fin. Plutôt un nouveau départ! En effet, vous pourrez désormais lire mes critiques sur un nouveau site, plus clair, plus pratique et surtout beaucoup plus évolutif… Je déménage sur le site www.anglesdevue.com que j’ai voulu plus pro, plus complet, mais avec toujours la liberté de ton qui animait mes articles et surtout l’humour que j’essayais de leur imprimer parfois…

Alors rendez-vous très vite sur ce nouveau site pour découvrir les critiques des film de ces dernières semaines et pour me faire part de vos impressions.

En tout cas, merci de tout coeur pour votre soutien, votre participation, vos commentaires passionnés au cours de ces trois années enrichissantes, et merci de continuer de suivre mes tribulations cinématographiques, de me soutenir dans ma tâche parfois compliquée.

Voilà… C’était la dernière séance, c’était la dernière séquence, et le rideau sur le blog est tombé…

the end

Publié dans Non classé | 2 commentaires

L’innocence enfantine perdue dans la forêt des problèmes d’adultes

Lassés de leurs incessantes querelles, les parents de Yuki décident de se séparer. Cela arrive malheureusement dans de nombreuses familles, occasionnant souvent un traumatisme plus ou moins profond chez les enfants ainsi écartelés entre leur père et leur mère. Mais dans le cas de cette fillette de neuf ans, la situation est encore plus complexe. Elle est en effet née d’un père français et d’une mère japonaise, et cette dernière s’apprête à retourner vivre au Japon, avec la petite fille, dont elle a obtenu la garde. Pour Yuki, cela signifie partir vivre dans un pays et une culture qui lui sont relativement étrangers, abandonner derrière elle son père mais aussi Nina, sa meilleure amie. Un véritable crève-cœur pour les deux gamines… Alors elles sont prêtes à tout pour empêcher cette séparation, y compris à fuguer…

Yuki & Nina - 2  Yuki & Nina - 4

Le projet Yuki & Nina est né d’une discussion entre le comédien Hippolyte Girardot et le cinéaste japonais Nobuhiro Suwa. Ensemble, ils ont imaginé une histoire de séparation, de divorce, de déracinement et de filiation – des thèmes chers au réalisateur nippon – mais vue du début à la fin par le prisme d’un regard d’enfant. L’idée, assez originale, n’a été que peu exploitée à l’écran jusque là et ne pouvait que séduire ces deux personnalités atypiques, qui aiment se lancer dans des expériences cinématographiques hors normes.
Une idée de défi créatif qui se retrouve aussi dans la décision de coréaliser le film. A priori, rien d’extraordinaire. On ne compte plus les cinéastes qui opèrent en tandem de façon harmonieuse. Mais la collaboration entre deux réalisateurs de nationalités différentes est autrement plus rare et complexe. D’autant qu’ici, les deux auteurs ont encadré simultanément le tournage – chacun se répartissant les rôles en fonction de son expérience et de ses capacités linguistiques – mais ils ont aussi effectué le montage chacun de leur côté, confrontant leurs propres visions de l’œuvre.

Ce film à quatre mains souffre parfois de ce choc des cultures et des points de vue de mise en scène, qui génère d’étranges variations de rythme et de tons. Mais il s’en nourrit aussi, puisque la démarche créatrice, ballottée entre deux univers très différents, deux styles opposés, symbolise parfaitement les interrogations de la petite Yuki, prise entre deux feux, deux pays, deux vies…

La première partie, menée comme une petite comédie fraîche et légère où pointe ça et là une profonde mélancolie, est la plus touchante. On y voit les deux gamines espiègles tenter de rabibocher les parents de Yuki à leur façon, naïve et imaginative. Par exemple en écrivant une lettre anonyme qui invite les deux adultes à se réconcilier… Lettre que la mère de Yuki découvre avec les larmes aux yeux, désarmée par ce mélange d’insouciance et de douleur qu’elle perçoit chez sa fille, principale victime de l’échec de son mariage. Une des plus subtiles scènes du film est d’ailleurs celle où lors d’un des derniers repas réunissant cette cellule familiale en pleine déconfiture, les parents laissent éclater leurs divergences et quittent la table, y abandonnant Yuki. Le plan fixe qui s’attarde sur la fillette montre l’immense sentiment de solitude éprouvé par cette petite chose perdue dans une querelle d’adultes qui lui semble totalement aberrante, absurde, incompréhensible.

Yuki & Nina - 5  Yuki & Nina - 3

Puis le ton change lors d’une seconde partie plus contemplative, plus mystérieuse, où Nina entraîne Yuki dans une fugue en forêt, loin des problèmes des adultes.
La traversée de la forêt retrouve ici la fonction symbolique qu’elle occupe dans certains contes de fées. Elle correspond à une épreuve initiatique, une façon de surmonter ses peurs et de renaître sous une autre forme, plus aguerrie, plus forte. C’est pour Yuki la transition entre deux univers, la France et le Japon, le trouble d’un couple en pleine explosion et l’apaisement procuré par la découverte d’une nouvelle cellule familiale, l’innocence enfantine et le début de la maturité adolescente…
Cette seconde moitié du film risque fort de paraître un peu moins convaincante. Trop lente et, selon les goûts, trop ou insuffisamment abstraite. Dommage, car le choix de basculer dans une sorte de dérive onirique était des plus audacieux. Les réalisateurs évoquent pêle-mêle, le voyage de Chihiro (pour le côté fable initiatique, sans le bestiaire monstrueux et la folie baroque), la forêt de Mogari (où la forêt permet d’accepter l’idée d’une rupture, d’une forme de deuil) ou « Kafka sur le rivage », l’excellent roman d’Haruki Murakami, mais ils peinent à conférer à leur film une densité comparable aux œuvres précitées.

Du coup, même si la conclusion s’avère subtile et délicate, on reste un peu sur notre faim, un peu décontenancés par la trop grande disparité entre les deux voies narratives adoptées par les cinéastes. On devine sans peine qu’Hippolyte Girardot a plus pesé sur la première moitié de l’œuvre, celle tournée en France. Dynamique, spontanée, la mise en scène lui ressemble un peu. Et on imagine très bien Nobuhiro Suwa à la baguette lors de la seconde moitié – tournée au Japon – au rythme plus posé, qui multiplie les plans fixe et mutiques.

Présenté à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes en 2009, Yuki & Nina n’a pas fait l’unanimité au sein d’un public légèrement décontenancé par le dispositif assez curieux, presque expérimental de Suwa et Girardot. En revanche, les deux comédiennes principales, Noë Sampy (Yuki) et Arielle Moutel (Nina), ont su, elles, rallier tous les suffrages et toucher les spectateurs par leur candeur et leur complicité. Pour elles, et pour quelques scènes très réussies, Yuki & Nina mérite le coup d’œil…

Note : ÉtoileÉtoileÉtoileÉtoile

Yuki & Nina

Publié dans critiques | Laisser un commentaire

Maîtrise en polar, menschion “bien”

S’il l’avait désiré, Sam (Nicolas Cazalé) aurait pu travailler avec son grand-père Victor Hazak (Samy Frey), qui tient l’épicerie familiale dans un des quartiers juifs de Paris. Mais il a choisi une autre voie, celle du banditisme. Il est en effet plus doué pour percer les coffres que pour tenir un tiroir-caisse… Mais aujourd’hui, la situation a changé. Son complice de toujours, Tonio (Anthony Delon), voudrait arrêter avant de faire « le braquage de trop » et lui a désormais la garde de son fils de sept ans. Plus une nouvelle femme dans sa vie. Une journaliste qui ignore tout de ses activités criminelles. Alors il voudrait se ranger.
Mais le manque d’argent se fait vite sentir, et Sam accepte la proposition d’un ultime coup pour le compte d’un truand local, Simon Safran (Maurice Bénichou), qui a jadis eu des liens très proches avec sa famille…

Mensch - 4  Mensch - 2

Acteur et réalisateur touche-à-tout, Steve Suissa revient avec Mensch, un polar de facture très classique, où s’entremêlent habilement la préparation plus l’exécution d’un braquage et la vie privée du personnage principal. Dans les deux cas, le cinéaste décrit des relations claniques complexes et tumultueuses.
D’un côté, Sam doit affronter son entourage familial. Son frère n’approuve pas son mode de vie, et encore moins son immoralité. Sa mère fait semblant de ne rien voir, mais a peur pour lui. Son grand-père reste également mutique, même si on devine qu’il cache un lourd secret. Son fils et sa petite amie commencent à se poser des questions embarrassantes…
De l’autre, il y a les liens qui unissent les truands, presque assimilables à des liens familiaux. Tonio et Sam sont comme deux frères. Simon adopte peu à peu une attitude paternaliste vis-à-vis de ce dernier, au grand dam de Youval, son bras droit, qui pensait être le seul digne de cette affection quasi-filiale. Ceci créé des tensions, des jalousies. Plus que le casse en lui-même, c’est de ces luttes intestines que viendront les principaux enjeux dramatiques du scénario, qui du coup, se retrouve nimbé d’une aura toute shakespearienne.

Mensch - 5  Mensch - 3

Même si l’on devine assez rapidement les tenants et les aboutissants de cette sombre histoire de famille(s), on ne s’ennuie pas une seule seconde, grâce à la mise en scène efficace, sobre et sans fioritures, de Steve Suissa.
Mais le vrai point fort du film réside surtout dans son casting, impeccable. Nicolas Cazalé est une fois de plus très convaincant dans la peau de ce type en pleine maturation, pas si éloigné que cela du personnage qu’il incarnait dans le très bon Le fils de l’épicier, il y a deux ans. Anthony Delon est également épatant de sobriété et de charisme dans le rôle de Tonio, le truand plus avisé, plus sage. Et on a le plaisir de retrouver les excellents Maurice Bénichou et Sami Frey dans les rôles assez fins des patriarches rivaux, unis par un passé tragique.
Ajoutons à ces acteurs de premier plan quelques seconds rôles très convaincants, de Myriam Boyer (la mère de Sam) à Sara Martins (sa petite amie), de Max Baissette de Malglaive (son fils) à Steve Suissa lui-même (le frère)…Seul Mickael Abitboul en fait un peu trop dans le rôle de Youval, mais à sa décharge, c’était sans doute le personnage le moins évident à incarner…

Mensch exhale un agréable parfum de polar psychologique à l’ancienne, et nous fait retourner à une époque pas si reculée où le cinéma de genre français occupait les sommets du box-office. La prétention du film de Steve Suissa est bien moindre, mais c’est justement cette humilité et ce respect des conventions du polar qui lui confèrent tout son charme et qui font de lui une réussite, à découvrir sur grand écran…

Note : ÉtoileÉtoileÉtoileÉtoile

Mensch

Publié dans critiques | Laisser un commentaire

Entre idolâtrie et tourments, les mystères de l’amour…

Curieux film que Persécution le dernier long-métrage de Patrice Chéreau… Une œuvre étrange, froide, complexe, austère et assez inclassable, qui devrait logiquement diviser le public comme elle a divisé les critiques, en fonction de la façon dont elle est abordée et comprise…

De quoi parle le film, exactement ? De persécution… oui, d’accord, gros malins, c’est dans le titre… Mais encore ? Déjà faut-il s’accorder sur la définition du mot « persécution » et choisir à partir de là comment on doit voir l’histoire du film…
Au sens strict, la persécution, c’est l’action de tourmenter quelqu’un par des traitements injustes et cruels. Une forme de harcèlement ou de torture.
Il existe aussi une définition en rapport avec la psychiatrie : la persécution, ou délire de persécution, est « une forme de délire dans lequel le sujet se croit attaqué dans son bonheur, ses intérêts, sa santé et même son existence, soit par des personnages réels, soit par des forces imaginaires ». Une sorte de psychose pouvant alimenter des hallucinations.
Donc deux façons de comprendre le titre et deux façons d’aborder le film.

L’une d’elle est rationnelle. Il s’agit de l’histoire de Daniel (Romain Duris), un jeune homme qui gagne sa vie en rénovant des appartements. Un beau jour, il se trouve confronté à un inconnu (Jean-Hughes Anglade) qui semble s’être entiché de lui. Il l’épie, le harcèle, n’hésite pas à s’introduire à son domicile… Une forme de persécution, donc… Daniel a une petite amie, Sonia (Charlotte Gainsbourg). Mais ils ne vivent pas ensemble. Dès le début de leur relation, les choses ont été clairement définies. Elle a besoin de son indépendance et est amenée à se déplacer fréquemment pour raisons professionnelles. Daniel le vit mal. Il a envie de plus d’investissement de la part de celle qu’il aime, qu’il idolâtre, même. Elle le tourmente, lui fait du mal involontairement. Sans s’en rendre compte, lui aussi va la persécuter, en s’introduisant à son domicile, en l’enjoignant de changer, de venir vivre avec lui… Dès qu’elle est là, il la saoule de paroles, la vampirise complètement par son attitude outrancièrement possessive.

Persécution - 5  Persécution - 2

Abordé sous cet angle, le film est relativement limpide et fonctionne avec le principe de l’arroseur arrosé. Daniel est la fois harcelé et harceleur. Il est tout d’abord persuadé d’être un type bien, sûr de ses convictions et de ses idées. Il va se découvrir tel qu’il est réellement, un homme antipathique, hautain, cassant et distant. Il croit aider son ami Michel (Gilles Cohen)? En fait, il lui pourrit la vie. Il est persuadé que Sonia le tient à distance ? En fait, c’est lui qui la tient à distance, en lui cachant certains aspects de sa vie, comme son meilleur ami Thomas (Alex Descas)… A travers plusieurs saynètes, Chéreau dresse le portrait d’un homme perturbé, compliqué et terriblement paumé. Un type qui aimerait recevoir beaucoup, mais qui est incapable de donner, incapable d’aimer. Sa vie est un chantier sans fin, un comble au vu de son métier, ou plus probablement, un subtil symbole de la part du cinéaste… Daniel est l’un de ces personnages qu’il affectionne particulièrement, qui lui permettent de traiter de la fragilité des relations humaines, et principalement de la relation amoureuse, l’un de ses thèmes récurrents.
Pour traiter le sujet et souligner les heurts entre Daniel et son entourage, la mise en scène joue d’ailleurs la carte de la rupture, avec un enchaînement de séquences très sec, sans liant apparent, et de nombreuses ellipses. Un montage curieux qui risque de décontenancer plus d’un spectateur.

Mais c’est là qu’intervient l’angle de lecture alternatif, plus riche en possibilités d’interprétation. C’est toujours le portrait d’un homme – Daniel, Michel, Thomas ? – mais, cette fois, d’un homme psychologiquement malade, perturbé, souffrant de délire de la persécution ou pire, de schizophrénie paranoïde.
Dans cette hypothèse, le personnage de Jean-Hughes Anglade pourrait n’être que le fruit de son imagination, une hallucination ou l’une des composantes de sa psyché tordue, une sorte de miroir réfléchissant sa propre attitude vis-à-vis de Sonia.
Tout comme on peut remettre en question l’existence des autres personnages : Sonia tente-t-elle de rester vaille que vaille auprès de l’homme qu’elle aime, malgré ses troubles mentaux ? Est-elle seulement encore physiquement présente, ou n’est-elle plus qu’un fantasme ? Thomas est-il réel ou le fruit de l’imagination de Daniel ? (A un moment, Sonia lui dit qu’elle pensait que cet ami était imaginaire…). Michel, qui débarque un peu n’importe quand dans la vie de Daniel existe-t-il vraiment ? Est-il un copain d’autrefois, avec lequel il se serait brouillé ? Ou bien symbolise-t-il le passé de Daniel lui-même. Auquel cas son histoire, sa dépression, seraient celles du jeune homme… A chaque spectateur la possibilité d’assembler comme bon lui semble les pièces du puzzle…
De toute façon, le résultat est le même qu’avec la lecture plus conventionnelle de l’œuvre. Il s’agit de montrer comment l’amour peut se transformer en persécution. Comment l’envie de posséder l’objet de son désir peut tourner à l’obsession, comment le rejet de l’autre peut être blessant, comment une rupture peut avoir de graves conséquences sur un mental faible…

Certains trouveront peut-être cette approche stupide, un peu tirée par les cheveux, les différentes interviews données par Patrice Chéreau abordant l’œuvre sous l’angle linéaire et rationnel… Mais certains éléments tendent à la conforter. Le montage heurté, saccadé. Ou les cadrages choisis par le cinéaste, étouffants, oppressants… Ou encore des éléments de dialogue qui peuvent se lire à double sens.
Il y a aussi le lien de parenté entre la coscénariste Anne-Louise Trividic et Pierre Trividic, auteur du magnifique L’autre… le portrait d’une femme au bord de la folie.
Et la chanson finale, « Mysteries of love », qui a déjà été utilisée au cinéma dans le Blue Velvet de David Lynch, un grand film psychanalytique !

Persécution - 4  Persécution - 3

L’important, c’est que, d’une façon ou d’une autre, le propos de Patrice Chéreau reste totalement intelligible et cohérent, rythmé par quelques séquences fortes : l’introduction, où une jeune femme reçoit une gifle de la part d’une SDF qui fait la manche dans le métro – geste violent, humiliant-, la scène de l’accident de moto, ou le face-à-face entre Daniel et son persécuteur, où se libèrent les secrets du personnage principal.
C’est un film dans la lignée de ses œuvres précédentes, grave, funèbre, douloureuse. Une histoire d’êtres déchirés, torturés par des sentiments ambigus, de personnages en proie, malgré eux, à une profonde solitude. Des rôles évidemment difficiles, donc attirants pour des comédiens aussi confirmés que Romain Duris, Charlotte Gainsbourg ou Jean-Hughes Anglade, tous très bien.
Pas sûr, cependant, que ce dernier fasse l’unanimité des spectateurs, au vu des ricanements provoqués par chacune de ses apparitions, il est vrai assez saugrenues dans le contexte du film… D’ailleurs, certains rejetteront probablement en bloc cette œuvre thématiquement classique, presque trop théâtrale, et formellement dérangeante, trop bizarre. Alors que d’autres crieront au génie, emportés par la profondeur « dostoïevskienne » du scénario…

Il est clair que cet étrange objet filmique ne laisse personne indifférent, et génère tellement d’impressions contraires, entre agacement et fascination, qu’on sort de la projection avec un avis mitigé, incapable de dire s’il s’agit d’un grand film ou d’une œuvre ratée. Persécution n’est probablement ni l’un ni l’autre, mais c’est une œuvre intéressante, très personnelle et audacieuse, qui secoue le public et crée un certain malaise. Du mépris ? C’est tout le contraire. Patrice Chéreau a le mérite de respecter ses spectateurs, en les estimant capables de réagir, et de faire les efforts intellectuels nécessaires pour comprendre son film et le ressentir. Dans un milieu où les émotions prémâchées et les situations stéréotypées sont reines, c’est suffisamment rare pour être souligné. Et défendu…

Note : ÉtoileÉtoileÉtoileÉtoile

Persécution

Publié dans critiques | Laisser un commentaire

Plus cruelle la vie

Pour son premier long-métrage, la jeune cinéaste Léa Fehner n’a pas choisi la facilité. Déjà, elle l’a doté d’un titre à rallonge mystérieux et peu engageant : Qu’un seul tienne et les autres suivront. Ensuite, elle s’est entourée d’acteurs peu ou pas connus, ce qui est toujours un léger handicap  pour la carrière d’un film. Enfin, elle a construit un film-choral, genre éminemment périlleux pour n’importe quel cinéaste expérimenté, et donc, à fortiori, pour une réalisatrice débutante. Trois choix assumés qui risquent de rebuter quelque peu les spectateurs potentiels…
Mais passer à côté de ce film serait vraiment dommage. Il s’agit d’une œuvre ambitieuse, dense et subtile, poignante et révoltante, portée par des comédiens magnifiques et une mise en scène inspirée. Une des belles surprises de cette fin d’année, noyée parmi les sorties de films familiaux et de blockbusters.

Qu'un seul tienne et les autres suivront - 3  Qu'un seul tienne et les autres suivront - 2

La cinéaste nous propose de suivre trois histoires distinctes, et une douzaine de personnages, des destins douloureux, marqués par une misère sociale ou affective qui vont finir par se croiser au parloir d’une prison.
Il y a l’histoire de Zohra (Farida Rahouadj), une algérienne dont le fils aîné a été assassiné en France. Elle arrive à Marseille pour récupérer ses affaires, mais surtout pour tenter de comprendre ce qui s’est passé. Son objectif : rencontrer le meurtrier en tête-à-tête. Mais évidemment, la justice n’est pas prête à accéder à sa demande. Alors, Zohra se rapproche de la sœur du criminel, Céline (Delphine Chuillot) et gagne peu à peu sa confiance, sans lui révéler qui elle est…
Il y a aussi l’histoire de Laure (Pauline Etienne), une jeune fille qui cherche à sortir de son cadre de vie trop sage. Aussi, sa rencontre avec Alexandre (Vincent Rottiers) est une aubaine. Le garçon est tout ce qu’elle admire, un chien fou, un peu marginal, rebelle à l’ordre établi, qui n’hésite pas à transgresser les lois pour imposer ses idées et défendre les causes qu’il estime juste. Evidemment, ceci n’est pas du goût de la police, qui finit par arrêter le jeune homme et le jeter en prison. Laure est désemparée. Elle est trop jeune pour avoir le droit de rendre visite à celui qu’elle aime et elle se refuse évidemment à en parler à ses parents, qui réprouveraient cette idylle avec un jeune voyou. Elle demande à Antoine (Julien Lucas), un inconnu croisé par hasard, de l’accompagner au parloir…
Il y a enfin l’histoire de Stéphane (Reda Kateb), un type paumé, accablé par les galères. Sa mère le harcèle pour qu’il lui rembourse l’argent qu’elle lui a prêté, lui enjoint de trouver un travail mieux rémunéré, et de forcer sa petite amie à en faire de même. Mais justement, Stéphane n’a pas envie qu’Elsa (Dinara Droukarova) se remette à travailler. Et pour cause, c’est une ancienne prostituée… Un jour, le jeune homme attire l’attention d’un truand, Pierre (Marc Barbé). Stéphane ressemble comme deux gouttes d’eau à un des hommes de main du gangster, récemment condamné à vingt-cinq ans de réclusion. Pierre lui propose, contre une importante somme d’argent, de prendre la place du détenu jusqu’à ce que celui-ci soit mis en lieu sûr…

Ces trois histoires entrelacées, qui convergent vers une même séquence finale, dans le parloir de la maison d’arrêt, permettent à la cinéaste d’illustrer de nombreux sujets : la diversité et la complexité des liens filiaux, la justice et les injustices, l’aliénation sociale et sentimentale. Et bien sûr, la dureté de l’univers carcéral, vécue non pas de l’intérieur, mais de l’extérieur, via l’attitude des proches, entre douleur, colère et résignation. Le sujet, on le devine, tient à cœur à Léa Fehner. Et pour cause, la jeune femme a grandi près d’un centre de détention et a pendant longtemps été fascinée par les « parloirs sauvages » improvisés à l’extérieur de la prison par des femmes cherchant désespérément à aider leurs conjoints incarcérés à « tenir le coup ».
L’aspect social est important dans cette œuvre, d’une abondance thématique inhabituelle pour un premier long-métrage, mais la réalisatrice ne tient pas vraiment à faire passer un message. C’est juste le constat, glaçant et poignant, d’une société en plein malaise, où les individus sont trop englués dans leurs propres problèmes pour réagir face à la détresse des autres.
Alors la cinéaste cherche à interpeller le spectateur, le forcer à compatir à ces destins dramatiques certes romancés, mais inspirés d’exemples réels, de gens ordinaires. Elle y parvient dès la première séquence, percutante, où une femme complètement paumée, effondrée par l’incarcération de son mari, implore en vain l’aide des personnes qui attendent l’heure des visites, à l’entrée de la maison d’arrêt… Le ton est donné et la cinéaste ne lâchera plus son emprise sur le spectateur, à l’aide d’une mise en scène efficace et élégante, d’un montage précis et surtout d’une construction narrative brillante, qui entrelace de façon très fluide les différentes histoires, sans jamais déséquilibrer le récit, ni privilégier un personnage par rapport à un autre.

Qu'un seul tienne et les autres suivront - 5  Qu'un seul tienne et les autres suivront - 4

Mais le film doit aussi énormément à ses interprètes, tous magnifiques. Farida Rahouadj, visage froid et marqué, et Delphine Chuillot, plus démonstrative, sont remarquables de douleur contenue, laissant deviner des sentiments contraires faits de chagrin, de colère et de culpabilité. Vincent Rottiers confirme le bien que l’on pensait de lui dans le rôle de cet idéaliste rebelle à la société. Un rôle pas si simple, car il s’agit ici de montrer comment ce jeune homme sur qui la vie et les lois n’ont aucune prise, se retrouve transformé par l’emprisonnement, plus amer, plus colérique… Pauline Etienne incarne le personnage de Laure avec le mélange de candeur et de maturité dont elle avait déjà fait preuve dans Elève libre, de Joachim Lafosse. Une qualité qui avait aussi fait connaître l’excellente Dinara Droukarova, quand elle a débuté dans les films de Vitali Kanevski, et qui joue ici un rôle de femme avide de liberté et d’élévation sociale.
Il y a enfin Reda Kateb, parfait en type paumé, incapable de faire face à ses galères, aux femmes de sa vie, à la violence des autres… On avait déjà remarqué sa « trogne » dans Un prophète de Jacques Audiard. Touchant et intense, il fait preuve ici un talent d’acteur encore plus grand. Une vraie révélation.

Certains déploreront sans doute la construction trop « parfaite » du film, et le fait que la cinéaste ait privilégié l’émotion au détriment du fond. Il est clair que le film, en dépit de ses qualités, garde encore cette forme un peu trop « scolaire » qui caractérise les premiers films. Cela dit, l’ensemble est suffisamment efficace pour que l’on oublie bien vite ce défaut très relatif, et que l’on se laisse émouvoir par le sort des personnages. Certains ont su se laisser séduire puisque Qu’un seul tienne et les autres suivront a gagné le prix Michel d’Ornano (prix du meilleur premier film français décerné par un jury de journalistes américains) lors du dernier festival du film américain de Deauville et qu’il a été sélectionné à la Mostra de Venise.
Le talent de Léa Fehner est indéniable et laisse entrevoir une belle carrière de cinéaste, pour peu qu’on lui laisse la chance de pouvoir exprimer son propre style. Raison de plus pour défendre ce premier film fragile, à la fois grave et intense…

Note : ÉtoileÉtoileÉtoileÉtoileÉtoile

Qu'un seul tienne et les autres suivront

Publié dans critiques | Laisser un commentaire

Loup, y-es tu ?

Fort du succès de son dernier film, Le dernier trappeur, Nicolas Vanier s’est lancé dans un nouveau projet cinématographique, toujours en rapport avec sa passion, le Grand Nord et la nature encore sauvage ou préservée. Loup est l’adaptation de son roman éponyme (*), une fiction située sur la terre des Evènes, un peuple du nord de la Sibérie qui vit de l’élevage de rennes en respectant encore des méthodes et coutumes ancestrales.

Loup - 2  Loup - 6

Elle raconte l’histoire de Sergueï, un jeune homme de dix-sept ans à qui son clan a confié la garde de la harde de rennes, leur unique trésor. Lors d’une cérémonie rituelle, son grand-père lui remet le fusil qui l’aidera à protéger les bêtes des loups qui rôdent sur les plateaux. Mais au premier jour de sa nouvelle fonction, il est incapable de s’en servir. Attendri par le spectacle d’une louve protégeant ses quatre petits, il ne peut se résoudre à les abattre.
Il décide de cacher leur existence à son clan et apprend peu à peu à apprivoiser ces animaux sauvages. Tout va bien tant que les loups peuvent chasser du gibier pour se nourrir. Mais quand arrive le rude hiver sibérien, c’est une autre histoire…

Loup - 3  Loup - 7

Avouons-le tout de suite, cette fable évène est assez naïve et révèle bien peu de surprises. Il est avant tout destiné à un public familial et assez jeune, qui sera sans doute plus touché par le côté initiatique du récit et le message écologiste sous-jacent que les cinéphiles les plus aguerris…
Ceux-ci auront d’ailleurs un peu de mal avec le jeu des acteurs, qui donnent l’impression de déclamer leurs répliques de manière un peu théâtrale. Mais peut-être est-ce seulement la curiosité de voir parler en français une tribu du nord de la Sibérie, qui possède sa propre langue… Il faut dire que le film a été tourné sur place, au sein de la communauté évène, que Nicolas Vanier a côtoyée pendant de longs mois avant d’écrire son roman, mais que les protagonistes sont joués par de vrais acteurs, recrutés en France.

Loup - 5  loup - 4

Cela dit, ici, l’intrigue, l’interprétation et même la mise en scène importent peu. Ce qui compte, c’est le spectacle splendide de la taïga, en été comme en hiver, la beauté de la nature sauvage, la communion de l’homme et de l’animal. Et de ce point de vue là, on est copieusement servis… En sortant de la salle, on n’a qu’une envie : partir rejoindre loups et rennes dans les paysages enneigés de Sibérie… Loin de la grisaille parisienne, de la pollution, des grèves de RER, des habitants qui râlent contrent la vague de froid – ridicule, comparée aux -50°C en Sibérie…

Loin, aussi, de ceux qui, sûrs du bon droit que leur octroie le système libéral, s’ingénient à piller les ressources naturelles de la planète. Egoïstement, pour leur seul profit… En dévastant les forêts sibériennes, par exemple, ce qui restreint le territoire des évènes et menace leur survie… Car le message du film est qu’il est possible de vivre en harmonie les uns avec les autres, de faire cohabiter progrès et traditions ancestrales, à condition de respecter l’équilibre de la planète… La leçon est simple, mais elle n’a rien d’inutile dans un monde où l’on doit mettre les préoccupations écologiques au centre des débats, sous peine de voir peu disparaître la faune et la flore qui font la richesse de notre planète…

Alors promenons-nous dans la taïga, tant que le loup y est…
Wooooouuuuuuuuuuuuuuu! (hum, pardon, c’est mon côté bestial qui s’exprime…)

Note : ÉtoileÉtoileÉtoileÉtoile

(*) : « Loup » de Nicolas Vanier & Jean-Philippe Chatrier – éd. Pocket

Loup

(Billet dédicacé à Virginie, spécialiste des voyages dans le Grand Nord, et qui aimerait probablement y être en ce moment…)

Publié dans critiques | Laisser un commentaire

We, the people…

Avec Capitalism, a love story, l’infatigable Michael Moore continue son combat contre les inégalités sociales et la misère qui sévissent dans son pays, les Etats-Unis d’Amérique, pourtant la première puissance économique mondiale.
En 1989, dans Roger & moi, son premier documentaire, il tirait déjà le signal d’alarme, montrant que pendant que certains grands patrons accumulaient les bénéfices de manière outrancière, des milliers de travailleurs se retrouvaient au chômage, victimes de plans de rationalisation et de délocalisations vers des endroits du globe où la main d’œuvre est meilleur marché. Des villes entières se retrouvaient ainsi sinistrées, vidées de leur population et frappée par une augmentation de la criminalité locale…
En 2009, le constat est encore plus pessimiste. Le marché de l’emploi est toujours aussi sinistré, le nombre de miséreux a encore augmenté, au gré des expropriations ordonnées par des créanciers peu compréhensifs et exécutées manu militari par les forces de police, sans aucun ménagement. Et pour couronner le tout, le pays doit faire face à sa plus grande crise économique depuis le krach boursier de 1929 et la grande dépression : la tourmente financière et boursière qui a frappé l’ensemble de la planète à l’automne 2008…

Comment en est-on arrivé là ? Comment un pays aussi prospère, vanté comme modèle de réussite et de liberté partout dans le monde, a pu abandonner ainsi une grande partie de ses concitoyens ? Comment a-t-on pu laisser arriver un krach boursier aussi énorme, aux conséquences désastreuses pour bien des entreprises et bien des travailleurs ?
Michael Moore a évidemment sa petite idée. Il pointe du doigt ceux qui, pour lui, sont les responsables du fiasco : une poignée de patrons fortunés, les banques, et les garants du système financier américain, c’est-à-dire les véritables détenteurs du pouvoir aux Etats-Unis. Il dénonce les dérives du système libéral au cours des trente dernières années, durant lesquelles tous les garde-fous politiques ont sauté les uns après les autres, laissant les riches devenir de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus nombreux, et empêchant les capitaux de re-circuler pour assurer la bonne santé de l’économie du pays, la création d’emplois, le financement d’infrastructures pour le bien-être du peuple.

capitalism, a love story - 3  capitalism, a love story - 6 

Le cinéaste donne quelques exemples édifiants de l’immoralité du système actuel :
Une famille dévastée par le chômage, criblée de dettes, se voit obligée d’abandonner la maison qu’elle avait toujours habitée aux banques ou à des organismes créanciers qui feront du profit en la revendant à d’autres occupants un peu mieux lotis. Suprême humiliation, elle est tellement pauvre qu’elle ne peut guère refuser d’accepter un maigre salaire desdits organismes pour nettoyer son ancienne demeure et brûler toutes les traces de sa vie passée…
Des pilotes de ligne sont payés moins cher que certains ouvriers, et sont obligés d’arrondir leurs fins de mois en faisant de petits boulots à côté, au détriment de leur sommeil ! C’est rassurant de penser que des personnes ayant la responsabilité de la vie de centaines de passagers ont l’esprit plus préoccupé par leurs problèmes d’argent que par le pilotage de leurs appareils !
Un centre de détention privé pour jeunes délinquants, fonctionnant sur contrat avec l’état, magouille avec un juge pour augmenter le nombre de condamnation et la durée des peines, et par conséquent son chiffre d’affaires !

Il dénonce aussi le scandale des « dead peasants insurances», des polices d’assurance-vie contractées par les entreprises au nom de leurs employés, qui leur feront empocher un petit pactole en cas de décès desdits individus, alors que, bien entendu, leurs familles n’en toucheront pas un cent… Le principe, déjà, étonne. Franchement, ça vous viendrait à l’idée de prendre une assurance à votre nom sur la voiture ou la maison de votre voisin ? Bien sûr que non, et de toute façon, c’est illégal. Mais quand des grosses entreprises « investissent » sur la vie de leurs salariés, ça ne choque apparemment pas grand-monde au pays de l’oncle Sam ! Imaginez un peu l’aberration du système : une entreprise rémunère très mal un employé, qui du coup, n’a pas d’autre possibilité de couverture médicale que la mutuelle proposée par son employeur – pour rappel, il n’y a pas de sécurité sociale publique aux Etats-Unis. En cas de grave problème de santé, l’employé ne sera probablement pas couvert par la mutuelle, et, faute de soins, décédera probablement dans les mois qui suivront. La famille aura à payer intégralement les éventuels frais d’hospitalisation et les obsèques. L’entreprise, elle, empochera bien plus que l’ensemble de ces frais… Financièrement parlant, c’est brillant. Mais humainement, c’est dégueulasse…
Quand le système est ainsi fait qu’un salarié rapporte plus mort que vivant à son entreprise, faut-il s’étonner de voir des employés harcelés et poussés jusqu’au suicide ? (Au fait, ils ne pratiquent pas ça, quand même, chez France Télécom ?). On se doutait bien que les entreprises n’étaient pas là pour faire dans les sentiments, mais quand même, on n’imaginait pas à quel point les stratagèmes pour s’enrichir sur le dos des autres étaient tordus… Drôle de société, pauvre monde…

capitalism, a love story - 8   Capitalism - 9

Après ces cas concrets révoltants, symboliques du pouvoir de l’argent et du manque de considération des plus fortunés vis-à-vis des plus démunis, Michael Moore revient à ce qui constitue, à ses yeux, les origines du mal : la victoire de Ronald Reagan et des Républicains à l’élection présidentielle de 1980.
Le président sortant, James Carter, présenté avec humour comme un « rabat-joie », n’a pas su garder la confiance d’un électorat qui lui reprochait son relatif échec dans la « crise des otages » iraniens et la promesse d’une politique économique très austère. C’est donc son rival, l’ancien acteur Ronald Reagan, qui s’est emparé du pouvoir, grâce à une campagne électorale offensive, financée en grande partie par les dons « généreux » de grands groupes d’investisseurs, comme Merril Lynch. L’ancien président de celle-ci, Donald Regan, fut d’ailleurs nommé secrétaire d’état aux finances, et c’est lui qui est à l’origine des baisses d’impôts drastiques sur les grandes fortunes et sur les charges patronales, le taux d’imposition étant tombé de 90% à seulement 25% après le vote de cette loi ! Un sacré bouclier fiscal ! Puis il fut chef de cabinet du président Reagan, jouant quasiment le rôle d’un premier ministre – on peut constater son autorité dans une autre séquence, surprenante, où il donne sèchement des ordres à son Président ! – avant d’être mêlé au scandale de l’Irangate.
Conséquence de cette alliance entre les conservateurs et les groupes financiers : entreprises américaines, traders, banques et investisseurs ont pu profiter des années 1980 pour engranger de véritables fortunes, sans se soucier de l’état des finances publiques et des bouleversements occasionnés sur le marché de l’emploi…
Et encore, Moore, lassé de taper sur la famille Bush, ne nous rappelle pas que George Bush Sr fut vice-président de Reagan avant d’être lui-même élu au poste suprême, puis que son fils lui succéda douze ans plus tard, avec une campagne financée par Enron, une entreprise mêlée à un important scandale de fraude fiscale qui a impliquée des membres de la société… Merril Lynch (eh oui, le monde est petit, surtout vu du haut des gratte-ciels américains…)

Elu en 1992, le président démocrate Bill Clinton aurait pu essayer d’inverser la tendance et limiter le pouvoir du lobby des investisseurs, mais le ver était déjà dans le fruit. Ses conseillers financiers, comme le secrétaire d’état au trésor Robert Rubin, venaient tous de grands groupes comme la banque Goldman Sachs. Une tradition qui se perpétue puisque Henry Paulson, qui occupa le même poste chez Georges W.Bush, fut aussi président de Goldman-Sachs et qu’il fut le grand instigateur du plan de sauvetage des banques lors du naufrage de l’automne 2008… Certes, les liens entre le pouvoir et le monde de la finance ne sont pas nouveau, et existent dans bien des pays, mais on peut quand même s’interroger sur la pertinence de faire défendre les intérêts publics par des hommes dont le seul but était autrefois d’écraser toute concurrence et d’empocher le maximum de profits !

Surtout quand, en parallèle, la misère augmente, le taux de chômage atteint des sommets, toute l’économie s’effondre, à l’image de l’industrie automobile. Le cinéaste cite évidemment en exemple sa ville natale : Flint, Michigan. Autrefois ville prospère grâce à l’activité fournie par General motors, était déjà en net déclin à la fin des années 1980, quand Moore avait tourné Roger & moi. Elle est aujourd’hui une ville sinistrée, qui a perdu presque 25000 habitants en dix ans et dont plus de 25% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté. Un gâchis… Un constat d’échec patent…

capitalism, a love story - 7  capitalism, a love story - 5

Pour continuer d’engranger les profits sur le dos des habitants les plus pauvres, les banques ont commis l’erreur de s’attaquer à la seule chose qu’il leur restait : leur maison. Elles leur ont accordé des prêts à la consommation en les garantissant par l’hypothèque de leurs maisons. Ces prêts, appelés « subprimes » se sont avérés toxiques pour toutes les parties. Trois millions de foyer ont été incapables de les rembourser et ont donc perdu leur logement, leur ultime bien matériel. Les banques n’ont pas récupéré l’argent prêté et se sont retrouvées avec des milliers de maisons vides sur les bras, et vu les difficultés financières de l’ensemble de la population, n’ont pas réussi à les revendre. C’est ce qui a provoqué la faillite de la banque Lehman Brothers, une onde de choc qui s’est ensuite propagée à l’ensemble du système boursier. Et il n’est même pas certain que les principaux fautifs de ce fiasco économique en aient tiré des leçons…

Que faire alors, sinon espérer un changement, si ce n’est un miracle ?
L’élection de Barack Obama a fait renaître l’espoir chez de nombreux américains. Peut-il changer les choses ? Michael Moore, qui l’a soutenu pendant la campagne, un peu par défaut, aimerait y croire, mais il rappelle aussi que la campagne d’Obama a été financée par des grands groupes d’investisseurs, ceux-là même qu’il pourfend dans son documentaire, et qu’il n’a pas hésité à voter le plan de sauvetage des banques américaines par les fonds publics, sans aucune contrepartie. Pour le cinéaste, il s’agit d’un arrangement scandaleux, car alors que les banques et les groupes financiers ont ainsi pu se tirer sans trop de dommages de la tourmente économique (dont elles sont les principales responsables), au point de verser de nouveau des primes faramineuses à leurs traders, les citoyens qui ont financé par leurs impôts cette relance se voient encore refuser des prêts et risquent à tout moment saisies et expulsions…

La solution est peut-être ailleurs, dans une véritable révolution populaire, qui remettrait les citoyens américains au cœur du processus démocratique. Le film invite à la rébellion contre les lois les plus absurdes, contre les aberrations du système. Michael Moore exhorte ses compatriotes, notamment les plus jeunes, à prendre le relais de son action provocatrice, pour dénoncer inlassablement les dérives d’une société de moins en moins juste et pour faire changer les choses de façon collective.

capitalism, a love story - 2 capitalism, a love story - 4

Certains spectateurs vont hurler au film de propagande déguisé en faux-documentaire, enrager devant le manque de contrepoints proposés par Moore, parler de manipulation des images, dénoncer le total parti-pris du cinéaste. Ils n’auront pas tout à fait tort. Même si son travail s’appuie sur des enquêtes assez fouillées – les faits dénoncés sont on ne peut plus réels ! – Michael Moore est moins un documentariste qu’un pamphlétaire engagé qui cherche avant tout à rallier à sa cause ses spectateurs en utilisant les mêmes armes de propagande que le camp adverse. Alors oui, il joue la carte de l’émotion en insistant un peu trop lourdement sur les larmes des victimes… Oui, il met le public dans sa poche avec son humour potache, notamment quand il entoure les bâtiments des grandes banques américaines avec un ruban de policier délimitant une scène de crime… Oui, il ne montre que ce qui l’arrange et, avec son art consommé du montage, il s’amuse à ridiculiser une nouvelle fois son ennemi juré, Georges W. Bush… Mais il propose ainsi au spectateur américain une alternative totale aux informations distribuées par les chaînes de télévision, qui appartiennent essentiellement, comme chacun le sait, à de puissants groupes médiatiques gravitant autour des places financières et des hautes sphères du pouvoir, donc peu enclines à montrer certaines vérités qui dérangent…

En fait, ce qui dérange le plus ses détracteurs, c’est son positionnement politique assumé, incompatible, selon eux, avec l’objectivité que doit avoir un journaliste. (Là, il y a de quoi se marrer doucement, car tous les journalistes, et surtout ceux experts en politiques, ont leurs chouchous et leur lèchent les bottes pendant les interviews). Ben oui, Michael Moore est un activiste gauchiste assumé. Il ne s’en cache pas. Un infâme rouge, un communiste diront certains… Il en joue avec un certain art de la provocation, en utilisant par exemple une version jazzy de l’Internationale en guise de générique de fin !
Mais là, le principe est le même. Si Michael Moore propose à ses concitoyens de se pencher de manière un peu plus attentive sur les idées marxistes et les systèmes socialistes, c’est que tous ces concepts économiques ont été diabolisés pendant des années par les politiciens, les financiers, les média et toute une frange conservatrice de la population. Bien sûr, la guerre froide est passée par là, jouant sur le clivage philosophique et économique profond entre les deux blocs est/ouest, et la dérive totalitariste des pays liés à l’URSS n’a rien arrangé, mais cette peur des idéaux communistes a été entretenue depuis longtemps aux Etats-Unis. En fait, on a même fini par croire sur parole deux idées reçues. Déjà, que le système capitaliste était défendu par le Christianisme. Ensuite que la nation américaine était fondée sur le principe de l’économie capitaliste et que tout autre système serait une totale aberration.

Alors le cinéaste nous prouve le contraire. En recueillant tout d’abord les témoignages de prêtres qui affirment que le Christ serait probablement un farouche opposant de ce système économique injuste exploitant les plus faibles. Puis en s’appuyant sur le référent essentiel : la constitution. Il a bien vérifié, les mots « capitalisme », « libre échange », « économie de marché » ou « profit » n’y figurent pas. En revanche, il y a trouvé un ensemble de règles de vie en société fondées sur le bon sens, l’équité, la justice, et l’idée d’une nation administrée par le peuple pour le peuple, dans l’intérêt général. Le préambule commence d’ailleurs par « We, the people of United States of America…» (Nous, les citoyens des Etats-Unis…).
Tout est là, dans cette notion de collectivité. Peu importe, finalement, le système économique choisi. Capitalisme ou communisme, les deux se défendent sur le papier, du moment qu’ils ne sont soumis à aucune dérive. Ce qui compte, c’est le bien-être du peuple. Et, dans tout pays démocratique, cela passe forcément par un système d’imposition équitable où les sommes collectées sont utilisées pour la réalisation d’infrastructures collectives (écoles, hôpitaux, routes et moyens de transports,…) et l’octroi de services publiques. Oui, même aux Etats-Unis, symbole du capitalisme et de la privatisation de l’économie…
Pour bien enfoncer le clou, Michael Moore a mis la main sur un discours du président Franklin Roosevelt (peu suspect d’appartenir à une obédience communiste), daté de 1945, où l’homme qui mit en place le New Deal annonçait son intention d’inscrire dans la constitution des articles garantissant à chaque américain le droit à un emploi, à un niveau de vie minimum, une couverture sociale, un accès aux soins médicaux, le tout garanti par l’état.
Roosevelt est décédé avant de mener ce projet à bien et que ses successeurs ont bien vite enterré ces propositions peu avantageuses pour les citoyens les plus riches et les plus influents… Ca donne à réfléchir… Où en serait-on aujourd’hui s’il avait eu le temps d’aller au bout de sa démarche ? Connaîtrions-nous les mêmes catastrophes humaines, économiques et écologiques ?

Mais il est trop tard pour regretter les actes manqués. Ce qui compte, c’est ce qu’il convient de faire aujourd’hui, pour tendre vers davantage de justice sociale et de répartition des richesses, même au sein d’un système libéral. Sinon, les Etats-Unis d’Amérique, et toutes les nations occidentales qui les prennent pour modèle risquent bien de connaître le même déclin que l’Empire Romain, où les puissants, aveuglés par leur propre richesse, s’étaient totalement coupés du peuple.
Capitalism : a love story n’apporte pas vraiment de solutions – même s’il présente quelques initiatives intéressantes, comme cette entreprise autogérée par ses employés – mais Michael Moore a le mérite d’aider les spectateurs à ouvrir les yeux sur les limites de la société capitaliste et les pousse à réagir, à s’investir dans la vie politique du pays, à retrouver l’envie de se battre non pour soi-même, mais pour la collectivité.
Ce qui, par sa forme parfois maladroite, ressemble parfois à un brûlot politique anti-capitaliste, est surtout une œuvre d’utilité publique, qui pousse à réfléchir et à réagir. Remettre le citoyen, la collectivité et la démocratie au cœur du débat ? Yes we can !

Note : ÉtoileÉtoileÉtoileÉtoileÉtoile

capitalism, a love story

Publié dans critiques | Laisser un commentaire

Arthur et le mystère du scénario ultra-creux

Luc Besson a longtemps annoncé qu’il arrêterait la réalisation après son dixième long-métrage, mais il n’a pas pu se résoudre à laisser à quelqu’un d’autre le soin de réaliser Arthur & la vengeance de Maltazard, la suite de « son » Arthur & les Minimoys.

Dans ce nouvel épisode, le jeune Arthur, toujours interprété par Freddie Highmore, a profité de ses vacances chez ses grands-parents pour passer son rite d’initiation auprès des guerriers Bogo Matassalaï. Et pour terminer le séjour en beauté, il s’apprêtait à retourner, le temps d’une soirée, dans le monde des Minimoys, où l’attend sa bien-aimée, la princesse Sélénia.
Las, ses parents ont décidé de rentrer un jour plus tôt, et il fait bien évidemment partie du voyage… Mais au moment où, la mort dans l’âme, le garçon fait ses bagages, il reçoit un message de ses minuscules amis, un appel au secours. Ni une, ni deux, Arthur décide de fuguer pour partir à la rescousse de sa princesse… Il parvient non sans mal à rapetisser et gagner le monde souterrain, mais pas vraiment à l’endroit souhaité…

Arthur & la vengeance de Maltazard - 2  Arthur & la vengeance de Maltazard - 3

Et ? Plein d’action, de bagarres, d’aventures incroyables ?
Ben non, rien… De manière assez surprenante, il faut attendre un bon moment avant de voir le jeune héros rejoindre le mini-monde et même là, les péripéties s’avèrent peu spectaculaires en regard du premier volet, trépidant.

Il faut ici se contenter de la visite de Paradise Alley, la partie du royaume souterrain où se trouve la boîte de nuit de Max, le minimoy rastafarien. Le quartier a bien changé depuis le premier épisode. C’est devenu une vraie mégalopole, pleine de lumière depuis l’apprivoisement des vers luisants, encombrée par une circulation dense, et quadrillée par les troupes du tyran qui a remplacé Maltazard. L’occasion pour Besson de filmer un de ces univers futuristes qu’il affectionne, puisque la cité évoque fortement Blade Runner et… Le cinquième élément !

Arthur & la vengeance de Maltazard - 4  Arthur & la vengeance de Maltazard - 5

Pour le reste, outre une séquence introductive réussie, on trouve ça et là quelques gags, quelques séquences amusantes, et une ou deux péripéties qui font gagner un peu de temps jusqu’à la réapparition de Maltazard (ben oui, faut dire que c’est promis par le titre du film…), qui revient et qui n’est pas content…
Mais c’est au moment où l’on se dit que le récit va enfin s’emballer qu’apparaissent deux mots frustrants : « A suivre… ».
Il faudra donc patienter jusqu’au mois d’octobre 2010, et la sortie d’Arthur et la guerre des deux mondes pour connaître la fin de l’histoire et avoir droit, on l’espère, à un peu plus d’action…

Ce n’est pas qu’Arthur et la vengeance de Maltazard soit mauvais, ni même ennuyeux, mais c’est quand même bien trop léger pour justifier le prix de la place de cinéma, surtout pour un film destiné à toute la famille. Pas sûr, d’ailleurs, que les plus jeunes accrochent beaucoup à ce film certes sympathique, mais assez pauvre en gags visuels et en émotions. A ce petit jeu là, les minimoys risquent d’être balayés par les maximonstres, qui débarquent bientôt sur nos écrans…

Cela dit, on préfère encore voir Besson réaliser ce genre de scénario naïf, mais inoffensif, qu’écrire pour d’autres ces scripts idiots dont il a le secret, avec héros pleins de testostérone, méchants caricaturaux, fusillades et poursuites automobiles formatées…

Note : ÉtoileÉtoileÉtoile

Arthur & la vengeance de Maltazard

Publié dans critiques | Laisser un commentaire

Ca fait peur… tellement c’est nul…


« On a rarement eu aussi peur au cinéma ! »
proclame fièrement l’affiche de Paranormal Activity, LE film fantastique dont tout le monde parle depuis quelques mois. Gros succès au box-office américain, portée par un buzz savamment orchestré sur internet, et censée avoir filé les chocottes à Steven Spielberg en personne, l’œuvre traverse aujourd’hui l’Atlantique, promettant de terroriser à leur tour les spectateurs frenchy.

Louables intentions, mais après la projection du film d’Oren Peli, on est moins sous le coup d’un trauma que d’une grosse déception. On se demande si on a vu les bonnes bobines, si les scènes horrifiques ont été censurées ou édulcorées, ou si on vient de se faire arnaquer totalement par une équipe de petits malins… Car non seulement cet ersatz dégénéré du fameux Projet Blair Witch ne fait jamais peur, mais il provoque involontairement le rire et/ou l’ennui.

Paranormal activity - 5  Paranormal activity - 3

L’argument ? Un jeune couple fraîchement installé dans une belle maison de banlieue s’inquiète des bruits étranges qui perturbent leur sommeil – et qui ne sont ni des ronflements, ni des flatulences. Alors qu’est-ce que ça pourrait être d’autre ? La femme, qui se rappelle qu’elle a déjà été confrontée à des phénomènes similaires dans sa jeunesse, suspecte fortement un fantôme ou un démon de revenir la harceler. Son compagnon a l’idée géniale d’acheter une caméra vidéo et de filmer leur chambre à coucher pendant leur sommeil, traquant d’éventuels phénomènes paranormaux.
Comme le film est censé être un document authentique retrouvé par hasard et courageusement montré par la Paramount, le spectateur est donc invité à regarder, la majeure partie du temps, les deux couillons en train de dormir, attendant avec plus ou moins d’impatience qu’il se passe quelque chose – un bruit dans le couloir (ouuuuh…), une porte qui bouge toute seule (brrr…), une crise de somnambulisme de Madame (flip-flip…) et un ménage à trois avec l’homme invisible, qui se glisse dans le plumard des deux neuneus sans y avoir été invité (Maman, j’ai peur !)…

Mais comme cela pourrait vite s’avérer un peu longuet, ces séquences sont alternées avec des séquences diurnes où le caméscope enregistre – allez savoir pourquoi ? – les discussions du jeune couple, entre montées de stress et engueulades, et d’autres séquences nocturnes où Monsieur s’encombre de sa caméra pour aller à la rencontre du vilain démon qui les persécute. Pas très futé, vu qu’il est invisible et apparemment pas animé des meilleures intentions, et pas très cool pour les yeux du spectateur, obligé de subir ces images vidéo granuleuses, tremblantes et mal cadrées. C’est sans doute le prix à payer pour éprouver le seul plaisir du film : pouvoir se moquer de l’attitude complètement stupide du personnage, jeune coq persuadé qu’il peut régler tout seul son compte à un esprit maléfique plutôt que d’appeler les Ghostbusters, et ses questions débiles du genre « Y-a-quelqu’un ? » ou « Dis-moi qui tu es ? »… C’est pas Dieu possible d’être aussi con…

Paranormal activity - 2  Paranormal activity - 4

Cela dit, la plupart des spectateurs n’en profiteront pas, soit parce qu’ils auront eu la jugeote de quitter la salle avant la fin, évitant ainsi de gâcher un temps précieux, soit parce qu’ils auront depuis longtemps sombré dans le sommeil, vaincus par l’ennui. C’est tellement peu passionnant de regarder dormir puis s’agiter en vain les deux acteurs, par ailleurs aussi inexpressifs que des endives, qu’il y a de fortes chance de tomber dans les bras de Morphée dès les premières séquences du film. Du coup, on comprend mieux le «Bonne chance pour dormir après » lancé par l’affiche du film. Difficile, en effet, de se rendormir quand on a déjà fait sa nuit dans la salle de cinéma !

Si encore ça faisait un peu peur, on pourrait être indulgent devant cet objet filmique particulièrement ennuyeux. Mais non, même pas. On se croirait dans un vieux numéro de l’inénarrable “Mystères”, feue cette émission fantasticomique de TF1 présentée par le non moins inénarrable Jacques Pradel dans les années 1990… Même la fin, hautement prévisible, ne parvient pas à nous faire sursauter dans nos sièges. Paranormal Activity est plat, creux et soporifique… Bref, l’un des plus mauvais films de l’année…

« Vraiment flippant ! » proclame fièrement l’affiche du film.
Totalement d’accord avec ce jugement : cela fait très peur de voir que ce navet squatte les écrans et engrange les bénéfices au détriment d’œuvres de tout autre calibre, qui ne sont visibles qu’à grand peine dans nos salles de cinéma…
Vite, un exorciste pour nous en débarrasser !

Note : Triste

Paranormal activity

Publié dans critiques | Laisser un commentaire